Riche d’un parcours aux multiples facettes, Francis Dieulafait place la transmission des savoirs au cœur de des travaux. Il s’y exerce inlassablement au sein d’Hadès depuis maintenant plus de 10 ans.
Votre métier en quelques mots ?
Je suis responsable de la communication chez Hadès depuis 2010, avec la particularité d’y être aussi numismate, une discipline des sciences humaines que je pratique depuis le début des années 80 (la fin du XXe siècle).
Quel a été votre parcours ?
Avec un bac scientifique en poche, j’ai effectué mes études universitaires à Toulouse, d’abord deux années en « physique-chimie », puis un cursus en Histoire de l’art et Archéologie avec, in fine, un DEA (Informatique appliquée à l’étude des vases décorés sigillés). La suite… quelques fouilles en France et à l’étranger, découverte et étude d’un trésor monétaire en 1985 (lauréat du prix Gilljam, numismatique, au British Museum, 1992), responsable d’un service de concepteurs-rédacteurs au sein d’une société de génie logiciel, chef d’entreprise (multimédia culturel), puis autoentrepreneur (film et communication patrimoniale) et enfin retour au sous-sol… Hadès.
Vous attachez une grande importance à la médiation archéologique. Pouvez-nous nous dire en quoi elle est essentielle à vos yeux ?
Mon intérêt se porte davantage vers la vulgarisation que la médiation. Traducteur ou adaptateur de savoirs serait d’ailleurs plus pertinent que médiateur, un terme souvent connoté par des interventions en contextes conflictuels. Adapter un contenu spécialisé pour des publics variés c’est à la fois un challenge personnel – ne pas dénaturer le message tout en restant compréhensible – et une activité presque ludique. Imaginer le vecteur le plus adapté à sa cible et au message, puis élaborer des contenus qui captiveront l’attention. Le choix des divers éléments constitutifs (textes, images) et, dans certains cas, leur organisation sur le support ne sont pas à laisser au hasard. Ces choix sont porteurs de sens ; la communication a son – passionnant – métalangage.
Toute transmission des savoirs me parait essentielle, sous quelque forme que ce soit. Par le biais de l’archéologie et des archéo-sciences, communiquer pour expliciter nos connaissances sur notre passé pour mieux comprendre notre présent, voire anticiper ce que nous réserve l’avenir, c’est pas mal non ?
Quel projet, site ou collaboration a été le plus marquant de votre carrière ? Pourquoi ?
Dans mon (long) cursus, j’ai la chance d’avoir exercé simultanément des activités d’auteur spécialisé et de communicant. Deux moments m’ont marqué.
D’abord, et dans l’ordre chronologique, mes rencontres avec de « grands professeurs ». Des moments inoubliables de transmission : apprentissage, partage, rigueur et humanisme (sans oublier parfois le cadre des fouilles, l’Espagne, Chypre, c’est pas mal !). Puis ce fut l’écriture d’ouvrages destinés à la jeunesse, dont un sur l’archéologie et ses méthodes, du terrain aux analyses. Durant deux années j’ai pu bénéficier de la direction bienveillante mais intransigeante d’une responsable d’édition. Ce fut un apprentissage des projets éditoriaux, depuis le chemin de fer jusqu’à l’achat des visuels, en passant par la rédaction des textes, au signe près, et les entretiens (et leurs relectures critiques) avec de nombreux spécialistes.
Quelle est votre vision de l’évolution du métier d’archéologue ?
L’avenir de la profession ? Le futur est déjà là… les dernières années ont amorcé ce qui sera, me semble-t-il, les deux principaux axes des mutations à venir : l’un concerne l’amélioration des conditions de travail et de formation, l’autre est l’émergence des nouveaux procédés de collecte de données, leur traitement et leur diffusion (IA, sciences physiques, réseaux, …).
Mes craintes ? Le désintérêt du public pour la recherche des connaissances validées (ou, pire, son attrait pour la facilité d’accès aux informations erronées) ; que les moyens techniques se substituent que trop à la réflexion, et que l’État se désengage de ses missions d’aide à la recherche, valorisation, et conservation patrimoniale.
« Lectures pour l’été, quelques coups de cœur sur le thème Image et Communication » Francis Dieulafait
PANOFSKY Erwin – La vie et l’art de Dürer. Hazan, 2004, 409 p. (plusieurs éditions). « Pour ceux/celles qui s’intéressent à l’image (l’iconographie, les représentations, et l’iconologie, les messages). Lire le chapitre Melancholia. »
BARTHES Roland – Mythologies. Seuil, 2011, 256 p. (depuis 1957, plusieurs éditions). « La sémiologie du point de vue structuraliste. Savoureux et incontournable. Même si discutable et discuté, comme tous les points de vue. »
GERVEREAU Laurent – Voir, comprendre, analyser les images, coll. Guides repères, éd. La découverte, Paris, 1966 (2004 pour la 4e éd.), 196 p. « Un survol (plutôt universitaire) de l’image et de ses usages. »
AMEISEN Jean-Claude, KLEIN Étienne, LEGLU Dominique – Écrire la science, coll. Les Actes, ENSTA, Paris, 2010, 64 p. « C’est (très) court et c’est très bien. Des scientifiques commentent leurs expériences de vulgarisateur et de diffusion médiatique. »
MICHAUT Cécile – Vulgarisation scientifique. Mode d’emploi. Edp Sciences, Paris, 2014, 250 p. « Un peu comme l’ouvrage précédent, en plus détaillé, présente les concepts et des portraits (Klein, Lehoucq, Villani, Masson-Delmotte, …). »
MARCOLONGO Andrea – Étymologies pour survivre au chaos. Le Livre de Poche, 2021, 384 p. Digressions (trad. de l’italien) autour d’une centaine de mots. « Parfois poétique, très instructif, des surprises sur le sens « premier » de certains. »
Les références bibliographiques de Francis Dieulafait
DIEULAFAIT Fr. – Rome et l’empire romain, coll. Les Encyclopes, éd. Milan, Toulouse, 2011, 250 p.
DIEULAFAIT Fr. – Copain de l’archéologie : le guide des explorateurs du temps, éd. Milan, Toulouse, 1999, 250 p.
SCHAAD Daniel (dir.) – Le trésor d’Eauze, éd. Association pour la Promotion de l’Archéologie et des Musées archéologiques en Midi-Pyrénées, 1992, 612 p.